En cette période de semi confinement, la vingtaine de résidents de La Maison Béthel à Blonay a dû s’adapter à de nouvelles habitudes. Tous portent un masque. Tous respectent une distance physique de deux mètres entre eux. Tous mangent de façon isolée et échelonnée. Quand on est atteint de dépression, de burn-out ou de bipolarité, n’est-ce pas contre-productif au mieux-être visé ? « Si la grande majorité des activités ont été suspendues, un ou deux groupes quotidiens de partage ont actuellement lieu, ce qui est beaucoup plus que précédemment, indique Claude-Alain Nuti. Ils permettent à chacun de s’exprimer. C’est, pour les résidents, un moyen de se reconstruire différemment que par des visites ou des ateliers en commun. C’est en fait des moments d’exutoire : on évacue beaucoup de stress par la parole... et par le rire, aussi ! »
L’aumônier, une personne ressource essentielle
Avec sa collègue Julie Fuchs, l’aumônier n’a pas cessé ses visites, comme cela peut être le cas dans des structures hospitalières ou de soins. « Dans un établissement comme le nôtre, les aumôniers sont des personnes ressources essentielles, explique Katia de La Baume, directrice. Car les hommes et les femmes en difficulté psychique viennent chez nous pour y trouver un refuge social, mais aussi psychique et somatique. » Pour elle, impensable en effet d’imaginer tenir la vocation de Béthel – qui est de pouvoir « s’arrêter, choisir et repartir » – sans l’apport des aumôniers, « qui ont plus que leur place parmi nous et d’autant plus aujourd’hui » !
Davantage de questions existentielles
Dans ce temps particulier de pandémie, des questions existentielles émergent davantage dans l’esprit des résidents, estime Claude-Alain Nuti, par ailleurs pasteur d’une église évangélique Chrischona à Montreux : « Ils ont plus de temps pour réfléchir, et nous avons plus d’occasions d’échanger en bilatérales. » Depuis juste un mois en place avec Julie, suite au départ de Séverin Bamogo, l’aumônier a connu seulement deux semaines de pratique avant l’entrée en vigueur des nouvelles mesures sanitaires. Qu’a-t-il observé en termes de changement auprès de ces personnes vulnérables ? « Toute fragilité personnelle est mise à l’épreuve dans un temps de cantonnement comme actuellement », estime-t-il d’abord posément. Ce qui le frappe pourtant, c’est l’authenticité des différentes personnes qui vivent à Béthel et le fait qu’elles se tiennent les coudes : « Elles sont très sensibles au principe de solidarité, plus qu’avant à mon sens. »
Travail d’équilibriste en vue ?
Une solidarité qui sera des plus nécessaires si jamais le confinement total devait être prononcé. « C’est une préoccupation, concède Claude-Alain Nuti. Nous devrons alors faire un vrai travail d’équilibriste entre les mesures à respecter, et le soutien qu’il nous faudra assurer par d’autres moyens que la proximité. »
Gabrielle Desarzens