Vêtu de son aube blanche, le diacre Jules Neyrand entonne de sa voix puissante un extrait de l’opéra Guillaume Tell de Rossini intitulé « Sois immobile, invoque Dieu ». En ce dimanche 27 juillet, des chrétiens réformés, évangéliques et catholiques sont réunis à Gimel pour le culte patriotique, qui se déroule chaque veille de fête nationale depuis plusieurs décennies. Et puisque la célébration se tient dans les locaux de l’Etablissement médico-social « La Rosière », une trentaine de résidents désireux de participer ont aussi trouvé place dans la salle ornée de drapeaux.
Maxime Jaquillard, pasteur de l’Eglise évangélique de Gimel (FREE), accueille les fidèles avec ces mots : « Nous sommes réunis pour célébrer l’anniversaire de notre patrie. Nous sommes aussi réunis pour dire notre reconnaissance à Dieu pour la paix que nous vivons, et prier qu’il bénisse notre pays ». Il poursuit en évoquant une figure marquante de l’histoire suisse, celle du Général Dufour. Ce visionnaire aux multiples casquettes, co-fondateur de la Croix-Rouge, était un protestant aux solides convictions. Mais son attitude d’ouverture et de compréhension envers les catholiques a aussi rendu un grand service à la Suisse divisée de l’époque: « Il n’a pas gagné la guerre du Sonderbund, mais il a gagné la paix par sa modération et sa stratégie », partage le pasteur évangélique.
Citoyens de Suisse…et du Royaume de Dieu
Jules Neyrand apporte ensuite la prédication, à partir du texte biblique de Jean 4, 1-25 où Jésus rencontre une Samaritaine. Le diacre rappelle aux chrétiens de l’assistance que si leur nationalité suisse les réunit, ils possèdent une autre patrie, celle du Royaume de Dieu. « Pour symboliser notre vraie identité, je pense que nos Eglises respectives, réformées, évangéliques, catholiques, orthodoxes, devraient nous donner, avec notre certificat de baptême, une nouvelle carte d’identité de citoyen du Ciel », suggère-t-il.
Et d’illustrer son propos en offrant à son collègue évangélique une petite carte fabriquée maison sur laquelle il est inscrit «Ressortissant du Royaume de Dieu» (chaque participant en recevra une à la sortie). Jules Neyrand souligne encore que c’est sur cette appartenance commune qu’est fondée l’unité chrétienne : « Dieu aime cette unité. Et Christ a donné sa vie pour que son Eglise forme un seul Corps ».
Un pont entre chrétiens, un pont avec les laïcs
Cette unité de coeur, les participants l'ont manifestée en entonnant quelques chants dont le Cantique suisse (hymne national), en intercédant ensemble pour leur pays et en récitant le Notre Père. En guise de mot d'envoi, Maxime Jaquillard invite les chrétiens "à ne pas seulement avoir la main sur le cœur mais le coeur sur la main". Et c’est d’une seule voix que le pasteur et le diacre proclament la bénédiction finale. S’en suit un apéritif convivial, où les uns sont heureux de se retrouver alors que d’autres font connaissance.
Ancien président du Conseil de Paroisse de l’Eglise réformée, Jean-Daniel Favre témoigne avoir été très touché par le message de ce culte patriotique, auquel il participe depuis son enfance. A ses yeux, cette rencontre est un pont qui tisse des liens entre les communautés chrétiennes, mais aussi un pont avec des laïcs du village. En effet, durant des années, c’est la fanfare de Gimel qui accompagnait les cantiques et assurait la partie musicale. Et depuis que le culte patriotique se tient dans les locaux de l’EMS, les animateurs qui encadrent les résidents ont aussi l’opportunité de suivre la célébration.