Alors que le Proche-Orient semblait pouvoir se diriger vers la paix, le 7 octobre 2023 des centaines de combattants du Hamas ont franchi la frontière de Gaza pour aller semer la terreur, la mort et la destruction en Israël. Ils l’ont fait certes avec des raisons politiques, poussés par leurs conditions de vie et la mainmise israélienne sur la région. Mais ils étaient aussi convaincus de se battre au nom du "créateur Tout-Puissant". De mener une guerre sainte pour libérer des lieux sacrés et d’être récompensés s’ils y perdaient la vie.
La réaction d’Israël a été brutale elle aussi. Gaza est presque rasée, ses habitants affamés et isolés. Cette riposte tient du réflexe de protection, d’annihiler celui qui nous met en danger. Mais la politique d’Israël est aussi influencée par ceux qui lui voient un droit divin sur une terre. Et il ne faut pas oublier que le judaïsme, référence religieuse principale en Israël, reconnaît le «œil pour œil et dent pour dent» de l’Ancien Testament, mais pas le «aimez vos ennemis» de Jésus-Christ.
Notre vision de cet "Ultime" change notre manière d'agir
Ces épisodes dramatiques illustrent le pouvoir qu’ont les convictions. Croire en une réalité ultime qui dépasse l’horizon humain l’emporte sur l’intérêt personnel bien compris et sur les convenances. La vision que l’on a de cet « Ultime » change radicalement la manière d’agir. Une réaction courante en Occident est de se dire qu’un tel pouvoir est trop dangereux. Que toute considération surnaturelle ne peut que conduire au fanatisme ou à se gâcher l’existence.
Il faudrait donc en finir avec toute considération sur une transcendance, et ne se préoccuper que du matériel et du concret. Mais l’être humain se satisfait difficilement d’une absence totale de sens. Ainsi les sociétés les plus développées et sécularisées connaissent les taux de suicide les plus élevés. Il faut tenir compte du paradoxe de l’hédonisme : les personnes qui s’investissent pour un idéal sont globalement plus heureuses que celles qui ne recherchent que leur plaisir immédiat.
Des produits du hasard?
Or le point de vue purement matériel sur l’humanité affirme que nous sommes apparus par hasard à partir du chaos par le mécanisme de la sélection naturelle ; que nos ressentis sont des réactions chimiques sélectionnées selon leur utilité pour la reproduction ; que le bien et le mal n’ont aucune existence dans l’absolu ; et que notre seul destin est le néant. Bref, la réalité ne serait pas porteuse de sens. Rares sont ceux qui professent vivre uniquement dans cette perspective, et inexistants ceux qui le font vraiment.
Bien plutôt, on prône et vit un sens choisi, un sens construit. L’univers et la réalité ne sont pas porteurs de sens en eux-mêmes, alors créons le sens ! À chacun de décider ce qui a du sens pour lui ! Trouvons du sens, qui dans le plaisir, qui dans le succès, qui dans l’amour romantique, qui dans sa famille, qui dans sa renommée!
Un besoin de sens, qui dépasse l'horizon humain
Le philosophe et ancien ministre français Luc Ferry reconnaît bien ce besoin d’un sens transcendant, qui dépasse l’horizon humain. Paradoxalement, il prône un humanisme transcendantal : trouver dans l’humain la transcendance qui nous dépasse et justifie que l’on investisse sa vie. La démarche de Ferry est illustrée par l’idéal des Droits de l’homme, et par l’action humanitaire désintéressée. Mais cela reste un tour de passe-passe logique, un choix arbitraire.
La faiblesse de toute démarche qui fait reposer le sens sur un choix est celle-ci: l’Ultime que j’ai choisi ne me dépasse pas vraiment. Il n’existait pas dans la réalité avant que j’en décide, et je peux en changer lorsqu’il me dérange ou me coûte. Il s’effondrera quand les temps seront difficiles. Les prophètes de l’Ancien Testament affirmaient que les dieux faits de la main de l’homme ne sont pas des dieux, et ce qui valait pour des idoles de pierre ou d’or vaut aussi pour des constructions philosophiques et des idéaux choisis. Pour être vraiment une référence qui nous dépasse, un absolu doit exister que nous le voulions ou non, il doit être découvert et non inventé.
Trouver l'Ultime, une recherche essentielle
Nos conceptions sur la réalité ultime des choses sont importantes et puissantes. Une fausse conception de l’Ultime peut avoir des conséquences dramatiques. Mais l’absence de toute transcendance conduit à l’absence de sens, et les transcendances choisies et construites ne sont que fétus de paille. Cela nous invite tous à chercher sérieusement quelle est la réalité ultime, et à employer tous nos moyens pour nous assurer de trouver juste.
Retournons un instant en Palestine, cette fois il y a deux mille ans, au temps où les Juifs étaient la population occupée, et les Romains la puissance militaire dominante. Au soir du premier Noël, l’Ultime est né en la personne de l’enfant Jésus. Dieu s’est mis à notre portée, s’est fait humble et vulnérable. Jésus grandira et enseignera l’amour du prochain et même des ennemis. Il enseignera le pardon, et la recherche de la justice quoi qu’il en coûte.
Jésus se met à la place des victimes du 7 octobre et des enfants de Gaza
Jésus ira jusqu’à mourir pour réconcilier l’humanité avec son Créateur. Il mourra en priant pour le pardon de ses bourreaux. Le Dieu tout puissant se met à la place des victimes du 7 octobre et des enfants traumatisés de Gaza. Voilà un absolu que l’on ne peut inventer mais que l’on peut reconnaître. Et si un plus grand nombre pouvait trouver en lui sa référence, si ceux qui professent le connaître étaient sérieux à l’imiter, notre monde pourrait trouver enfin sa paix. Les chrétiens, juifs et palestiniens qui essaient de bâtir ensemble la réconciliation sont témoins de cet espoir*.
*Nous vous recommandons la formation «A l’écoute du Sermon sur la montagne dans le conflit israélo-palestinien, avec Salim J. Munayer, théologien et activiste», le 18 octobre à l'Eglise évangélique de la Pélisserie à Genève (sur inscriptions)