Rachael Denhollander est une avocate spécialisée dans les abus sexuels et les dynamiques institutionnelles liées à ceux-ci. C’est en tant que victime qu’elle s’est exprimée le 24 janvier au tribunal du comté d’Ingham à Lansing dans l’Etat du Michigan, lors du procès de Larry Nassar, l’ex-médecin de l’Equipe américaine de gymnastique.
La première à révéler publiquement les abus du médecin
En 2016, Rachael Denhollander a été la première à révéler publiquement les abus sexuels dont elle a été victime, tout comme plus de 150 autres gymnastes. Elle a été la dernière à s’exprimer lors du procès de Larry Nassar.
Elevée dans une famille évangélique et ayant fait l’école à la maison, l’ex-gymnaste a pris la parole pour détailler son cheminement intimement lié à un désir de pardon et de justice, alors que les premiers abus qu’elle a subis remontent à l’an 2000. Elle avait alors quinze ans. S’adressant à son abuseur, elle déclare : « Je veux que tu comprennes pourquoi j’ai pris cette décision, sachant très bien combien cela coûtait d’être ici aujourd’hui, et que j’avais très peu d’espoir que cela arrive. » La jeune femme, la trentaine, maintenant maman de trois enfants, continue : « Je l’ai fait parce que c’était juste. Quel qu’en soit le prix, c’était juste. Et pour moi, m’éloigner le plus possible de ce que tu es devenu, c’est choisir quotidiennement ce qui est juste, en lieu et place de ce que je veux. »
Elle en appelle à la bible de Larry Nassar
La jeune femme commence alors à partager ses convictions chrétiennes. Selon elle, le médecin de l’Equipe américaine de gymnastique, professeur à l’Université de l’Etat du Michigan, est devenu un homme dominé par des désirs égoïstes et pervers. « Tu as choisi de te livrer à ta propre cruauté, sans prendre en compte le coût que tes victimes devaient payer. Agir complétement à l’opposé de ce que tu as fait, c’est pour moi choisir d’aimer de façon sacrificielle, quel qu’en soit le coût. » Faisant référence à la bible que l’accusé a apportée avec lui lors des premières auditions, Rachael rappelle à ce médecin que s’il a lu la Bible, il sait que la définition de l’amour sacrificiel vient de Dieu, « qui a donné son Fils pour payer l’amende des péchés qu’il n’a jamais commis ».
On ne prie pas pour le pardon !
L’ancienne gymnaste continue en rappelant à Larry Nassar que l’on ne prie pas pour le pardon comme il a déclaré le faire, mais que le pardon découle d’une attittude de repentir. Le repentir, ajoute-t-elle, « demande de faire face et de reconnaître la vérité de ses actes dans toute leur horreur, sans atténuer et sans excuser leur portée, sans agir comme si de bonnes actions pouvaient effacer le témoignage de toutes les victimes entendues à la cour. »
Rachael Denhollander rappelle à son abuseur que la Bible affirme qu’il vaut mieux être attaché à une meule de moulin et jeté dans le lac que de causer la chute d’un enfant (Marc 9.42). « Et tu en as traumatisé des centaines ! » s’exclame-t-elle. Mais l’avocate-victime ne s’arrête pas là : « Si tu arrivais à faire face à ce que tu as fait, ta culpabilité serait accablante. Et c’est cela qui rend l’Evangile du Christ aussi bienfaisant. Il accorde la grâce, l’espoir et la miséricorde là où il n’y en a pas. Et tout cela serait là pour toi. »
L’abuseur se construit une prison
Selon la jeune femme, « lorsqu’une personne peut faire du mal à un autre être humain, et plus particulièrement à un enfant, sans ressentir de la culpabilité, elle a perdu la capacité d’aimer vraiment. » Rachael ajoute : « Larry, tu t’es fermé à toute chose foncièrement bonne et belle que notre monde pouvait t’offrir et qui t’aurait procuré de la joie et de l’épanouissement. Je te plains… Tu t’es construit une prison qui est bien plus horrible que toutes celles dans lesquelles je pourrais t’envoyer, et je te plains. »
A la fin de son intervention, faisant appel à la cour, l’avocate a demandé une condamnation qui indique que « ce qui nous a été fait importe, que nos souffrances sont reconnues, que nous avons une valeur infinie, que nous avons droit à la protection la plus haute que la loi puisse nous accorder, soit les sanctions judiciaires les plus lourdes à disposition. »
Le 24 janvier, la cour de justice du comté d’Ingham a condamné Larry Nassar à une peine allant de 40 à 175 ans de prison. Cette peine s’ajoute à une autre condamnation de 60 ans pour pédopornographie.
Antje Carrel
Pour la transcription complète en anglais de l’intervention de Rachael Denhollander le 24 janvier au tribunal d’Ingham, voir la page de CNN.