« L’accueil des migrants est-il un devoir ou un danger? » par Shafique Keshavjee

Shafique Keshavjee vendredi 20 novembre 2015 icon-comments 4

Le théologien et écrivain Shafique Keshavjee ne tient pas à dire qui a tort ou qui a raison, il se pose une question plus fondamentale. Une prise de position parue dans la rubrique « L’invité » de 24Heures le 12 novembre 2015, que lafree.ch relaie avec l’autorisation de l’auteur.

Les élections fédérales ont été dominées par la question de la migration. L’actualité européenne l’est aussi. Face à l’afflux massif de migrants fuyant des situations dramatiques (terreur semée par l’Etat islamique, misère économique, violence étatique), quelle politique migratoire faut-il développer?

Deux camps s’opposent

Schématiquement dit, deux camps s’opposent. Pour les uns, l’accueil des migrants est un devoir, pour les autres, un danger. Selon les premiers, c’est au nom de la tradition humaniste et humanitaire de la Suisse que l’accueil (à long terme ou provisoire) doit s’étendre. Selon les seconds, c’est au nom de la liberté et de la sécurité nationales que l’accueil doit se restreindre. Alors que sur les plans économiques, politiques et culturels les uns promeuvent l’ouverture, les autres défendent la protection.

Les deux camps ont leurs raisons et… raison. Toute politique migratoire est une pondération de ces deux valeurs. Mais les politiciens ne doivent oublier que seule une population rassurée peut s’ouvrir aux autres.

Et l’origine religieuse des migrants ?

Il est alors une question épineuse peu abordée: celle des origines religieuses des migrants. Et pour être plus précis, celle des effets d’un afflux massif de migrants se référant culturellement et cultuellement à l’islam. Pour les médias et partis les plus sécularisés, la religion est si secondaire que soulever une telle question ne peut que «stigmatiser» de manière intolérable des groupes minoritaires qui, tôt ou tard, adopteront nos valeurs occidentales. Selon eux toujours, l’«islamophobie» est une peur parfaitement infondée, car plusieurs enquêtes sociologiques auraient montré que la majorité des musulmans sondés se réfèrent positivement à ces valeurs.

L’islam « normatif », un danger

Il y a certes mille manières d’être «musulman» et chacun doit être traité avec respect et humanité. Mais ne pas voir que l’«islam normatif» dans ses textes fondateurs (Coran, propos et biographie de Mahomet) est un danger pour les non-musulmans, c’est refuser de voir la réalité en face. Un «danger», selon son étymologie, est ce qui peut nous «dominer». Or l’islam normatif n’a qu’une seule visée: soumettre le monde (familial social, politique) à l’enseignement du Coran et de Mahomet. Là où l’islam normatif progresse, les libertés fondamentales régressent, les chrétiens sont assujettis, les juifs méprisés, les athées bannis.

L’accueil des migrants est à la fois un devoir et un danger. Plus encore, il est un défi. Comme l’a affirmé récemment Angela Merkel à Berne, la présence musulmane en Europe est aussi l’opportunité de redécouvrir le trésor de la culture chrétienne, de le vivre et de le faire connaître. Aussi aux migrants qui frappent à nos portes.

Ce débat politique, culturel et religieux nous concerne tous.

Shafique Keshavjee (24 heures)

4 réactions

  • frangeul vendredi, 20 novembre 2015 13:29

    bonjour, les choses , les siècles ont changés depuis ce que l'évangile nous conseille de la parabole du bon samaritain .
    Aujourd'hui , prenez garde à vous , à vos proches et même à vos ennemis et amis , les frontières de notre pays doivent faire très attention .
    Trop d'ignorance , trop d'inconscience seront responsables des crimes à venir.

    Force et courage à vous .

  • Jean-Denis Kraege samedi, 21 novembre 2015 17:55

    Cher Shafique,
    Permets-moi de te dire que ton billet me déplaît parce qu'il suinte la peur. D’abord tu dis que les citoyens doivent être « rassurés » par le monde politique pour s’ouvrir aux autres. Ensuite, ce que tu appelles l’« islam normatif » est un danger pour les non-musulmans. Enfin l’accueil des migrants est un devoir et un danger. Le message que tu fais passer entre les lignes, c’est que le peuple a peur, qu'en son sein les chrétiens ont peur et qu’il faut, pour le moins, se demander s’il ne conviendrait pas de filtrer les demandeurs d’asile que l’on laisse entrer. Cela m’étonne de toi. Je pensais qu’en tant que chrétien évangélique tes certitudes seraient mieux affirmées, mieux ancrées. Si tu étais certain de la valeur de ta foi, tu ne craindrais, en effet, pas la confrontation – certes dure – avec d’autres manières de comprendre sa vie. Plus encore, comme tu le laisses entendre in fine, tu te réjouirais de l’occasion qui t’es offerte de montrer la supériorité de ta foi sur celle des autres. L’une des manifestations de cette supériorité pourrait justement être d’être capable d’accueillir des hommes et des femmes qui pensent et croient de manière fondamentalement différente de ta manière de penser et de croire. De plus tu pourrais te réjouir de ce que nombre de tes concitoyens, confrontés à des croyants conquérants, se posent peut-être enfin des questions sur leur abandon de la foi chrétienne. Je te propose de réfléchir un peu à tout cela. Bien cordialement. Jean-Denis123

  • P. North samedi, 28 novembre 2015 14:49

    Bravo Shafique pour ce texte clair, concis, responsable et parfaitement pertinent!
    Quant au commentaire selon lequel ton texte "suinte la peur", j'aimerais rappeler à son auteur, dont les certitudes sont si "affirmées", que 1) la peur est une fonction physiologique salutaire chez toutes les espèces, homme compris, 2) elle a chez l'homme une fonction civilisatrice indéniable, depuis la peur du gendarme jusqu'à la crainte de Dieu (comme disait un journaliste français il y a bien des années déjà: combien de policiers faudra-t-il pour remplacer un seul curé de campagne?); 3) Jesus lui-même a eu peur au jardin de Gethsemané - sans doute parce que ses certitudes étaient mal "ancrées"; 4) vu l'actualité, s'effaroucher d'un éventuel "filtrage" des migrants s'avère aussi indécent que surréaliste; 5) donner des leçons de courage et d'accueil est facile quand on n'est ni copte, ni chrétien pakistanais, afghan, syrien, irakien et j'en passe, mais qu'on habite un des pays les plus sûrs et démocratiques du monde. Enfin, l'accusation de "craindre la confrontation" à l'adresse de quelqu'un qui a passé une bonne partie de sa carrière à pratiquer le dialogue interreligieux - y compris avec l'islam - est pour le moins malvenu.

  • bibletude.org jeudi, 10 décembre 2015 18:30

    Comment comparer des mouvements de pensée entre eux, et par conséquent les comportements qui en résultent, notamment lorsqu'il s'agit de "religion" ?

    La sagesse et l'expérience montrent que trois points sont primordiaux :

    1. bien étudier, analyser le comportement du "fondateur" du mouvement, de la personne à l'origine du courant de pensée à analyser
    2. passer au crible les textes fondateurs, écrits par cette personne ou parlant de cette personne, et les situer dans leur contexte
    3. éviter le piège consistant à analyser un mouvement ou une pensée à travers le comportement de ceux qui se réclament faussement de lui


    Prenons l'exemple de Jésus :

    1. son comportement était exemplaire
    2. les textes fondateurs ont pris le soin de se distancier des textes antérieurs agressifs ("vous avez appris qu'il a été dit... mais moi je vous dis...") et mettent l'amour au premier plan
    3. ceux qui ont commis des crimes (croisades, inquisitions) au nom de Jésus ou de la Bible l'on fait en contradiction flagrante avec l'esprit des évangiles


    1. Le premier point est incontournable car le comportement du "fondateur" sera pris comme exemple par ceux qui le suivront, consciemment ou non
    2. Ceux qui se réclament d'une pensée se justifieront presque toujours en citant les textes fondateurs : c'est pourquoi le deuxième point est crucial. Non seulement Jésus a mis le doigt sur certains passages des textes de l'époque pour les parfaire, mais Paul nous explique que ces textes sont allégoriques, pour notre enseignement, et les pères de l'Église (tel Origène) nous montrent à quelle interprétation nous attacher (p.ex. le livre de Josué nous décrit les combats spirituels qui se déroulent dans notre monde intérieur)
    3. Pour démolir une pensée, un mouvement, la solution de facilité consiste très souvent à prendre dans l'Histoire les comportements de ceux qui s'en réclament - il devient alors primordial de se poser la question par rapport aux deux premiers points : ce comportement serait-il approuvé par le "fondateur" ? est-il conforme aux textes fondateurs ?


    On pourrait imaginer la conversation suivante :

    - Le chrétien : « Jésus est amour, il guérit des gens - il est même mort pour nous - alors que certains autres (guides, prophètes, gourous, maîtres à penser, leaders, etc.) sont plutôt violents (guerriers, etc.) »
    - Le non-chrétien : « vous oubliez les croisades, l’inquisition, etc. »
    - Le chrétien : « ceux qui faisaient cela désobéissaient au Christ, alors que ceux des mouvements qui sont va-t-en-guerre le font - souvent - par obéissance (au guide, prophète, gourou, maître à penser, leader, etc.) »
    - Le non-chrétien : « vous oubliez les textes de l’Ancien Testament, comme oeil-pour-oeil et dent-pour-dent »
    - Le chrétien : « Jésus a dit : "Moïse vous a dit…, mais moi je vous dis…" : il est donc évident que pour lui le Nouveau Testament prime sur l’Ancien Testament »

    Comme on le constate dans ce dialogue, il est primordial d'avoir en sa possession les outils d'analyse et de comparaison cités plus haut. Car comment comparer des "mouvements de pensée" (pour simplifier) entre eux ? Tout simplement analyser le comportement du "fondateur" du mouvement, passer au crible les textes fondateurs, analyser si le comportement de ceux qui s'en réclament y est conforme, afin d'éviter les amalgames. C'est le véritable padamalgam : méfiez-vous des contrefaçons :-)

Opinion - avertissement

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