Etre sel et lumière dans une société post-chrétienne selon Stuart Murray

vendredi 07 novembre 2014

Lors de la Journée de la FREE, le 2 novembre à Yverdon-les-Bains, Stuart Murray a montré comment les Eglises d'Europe peuvent se développer dans une société post-chétienne. Elles évoluent dans un contexte en pleine mutation. Cela les oblige à relever des défis. Mais la post-chrétienté permet aussi de saisir de nouvelles possibilités de développement et de témoignage. Résumé des deux interventions de Stuart Murray.

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Depuis quelques décennies, la culture européenne est en mutation. Elle est désormais appelée post-chrétienne. Il s'agit du plus grand changement que notre culture a connu depuis la Réforme du XVIe siècle. Ce changement a un gros impact sur les Eglises et leur mission.

Le préfixe « post » indique où nous ne sommes plus : une partie de ce qui nous était familier a disparu. Il fait place à une réalité nouvelle que nous explorons sans boussole ni point de repère. Nous savons que notre environnement change, mais nous ne savons pas dans quelle direction. Et si nous voulons savoir où nous sommes actuellement, nous devons comprendre où nous étions auparavant.

D'où venons-nous ?

La foi chrétienne ou le christianisme a pénétré presque toutes les sociétés dans le monde. Mais la chrétienté ne s'est développée qu'en Occident. La chrétienté n'est pas le christianisme. Mais alors, quelle est-elle ?

► La chrétienté est d'abord une manière d'exprimer le christianisme dans une région donnée. A l'intérieur de ce territoire, on suppose que les gens sont chrétiens et on envoie des missionnaires à l'extérieur, dans les régions considérées comme païennes.

► La chrétienté s'inscrit également dans une époque de l'histoire. Elle commence avec la conversion de l'empereur romain Constantin au IVe siècle. Dès ce moment, le christianisme devient la religion officielle de l'Empire.

► La chrétienté a engendré une civilisation, une culture imprégnée de symboles chrétiens sur le territoire, dans le langage et dans la manière de penser.

► La chrétienté participe à un arrangement politique, un partenariat entre l'Eglise et l'Empire romain, puis entre l’Eglise et différents gouvernements. Dans ce partenariat, l'Eglise bénit l'Etat et, en échange, l'Etat soutient l'Eglise. Il existe, encore pour quelque temps, quelques situations où l'Eglise et l’Etat sont liés.

► La chrétienté est une idéologie. C'est une manière de concevoir l'action de Dieu dans le monde, ainsi que le rôle de l'Eglise. C'est une vision du Royaume de Dieu qui a un impact dans la société.

La chrétienté a été une culture à la fois brillante et violente. Elle était totalitaire et punissait toute différence. En cela, elle n'était pas différente des Etats islamistes qui, aujourd'hui, nous semblent brutaux.

La Réformation du XVIe siècle a marqué le début de la désintégration de la chrétienté. Celle-ci s'est divisée en plusieurs petites chrétientés : catholique, réformée, luthérienne, anglicane, etc. Chacune pensait être la vraie chrétienté et cela a engendré des guerres. Au XVIIIe siècle, les Européens se sont fatigués de ces conflits et ils ont pensé que la raison était meilleure que la religion. Ce fut le siècle des Lumières et le début de la fin de la chrétienté. Durant le XXe siècle, la chrétienté a perdu sa cohésion et l'Europe est entrée dans la post-chrétienté.

Ce qui a changé

Notre société post-chrétienne est très différente de la société où régnait la chrétienté. Mentionnons ce qui a changé :

► Au IVe siècle, l’Eglise est devenue un élément central de la société. Aujourd'hui, au contraire, l'Eglise a été déplacée aux marges de la société. Elle est devenue une minorité.

► A l'époque de la chrétienté, les chrétiens se sentaient un peu chez eux dans leur culture, avec leurs habitudes et leurs valeurs. Aujourd'hui ils sont devenus des pèlerins exilés et aliénés.

► A l'époque, les Eglises et les chrétiens avaient une place privilégiée dans la société. Désormais, dans la société plurielle actuelle, ces privilèges ont très logiquement disparu.

► A l'époque de la chrétienté, la société contrôlait ce que les gens croyaient et comment ils se comportaient. Dans certaines régions, les gens qui n'allaient pas à l’église étaient amendés. Désormais, ce contrôle n'est plus possible. Les chrétiens ne peuvent que revenir à ce qui se faisait dans l’Eglise ancienne : être des témoins.

► A l'époque de la chrétienté, l'Eglise était formaliste et travaillait à son propre maintien. La société était considérée comme chrétienne, il fallait juste maintenir les institutions existantes. Mais en post-chrétienté, l’Eglise doit changer et redevenir missionnaire. Actuellement, nous ne sommes qu'au début de ce processus de changement. Il va engendrer des résistances. Les Eglises lutteront contre ce changement.

Nous sommes donc à cheval entre deux mondes ; entre l'ancien monde de la chrétienté qui disparaît et le nouveau monde de la post-chrétienté qui le remplace. Nous devons parler les deux langages différents de ces deux mondes qui se succèdent.

Quelques défis pour les chrétiens

La post-chrétienté nous impose de relever des défis. Nous pouvons trouver cela difficile et préoccupant. Nous pouvons également les relever avec enthousiasme et célébrer la fin de la chrétienté !

► Dans une culture où les gens ne savent plus rien de Jésus-Christ, nous devons raconter son histoire comme l'ont fait les premiers missionnaires de l’Eglise ancienne. Lors d'une visite de la basilique de la Sagrada Familia à Barcelone, de jeunes anglais se sont intéressés à un carré magique dont la constante est 33, l'âge supposé du Christ lors de la crucifixion. « Ouah ! Il est mort jeune ! » Se sont exclamés les adolescents qui ne connaissaient strictement rien à l'histoire de Jésus.

► Nous devons apprendre à partager notre foi dans une culture plurielle, séculière et spirituelle. Certains croient qu'il n'y a pas de Dieu ; d'autres croient en un autre Dieu que celui de la Bible. Il n'existe pas de formule d'évangélisation bonne pour tous. Nos Eglises se sont construites dans un contexte d'ancienne chrétienté. Elles n'ont pas encore trouvé de nouvelles manières d'évangéliser.

► Les Eglises doivent développer des activités qui permettent à leurs membres de témoigner. Dans bien des communautés, les gens sont tellement sollicités par toutes sortes d'activités d’Eglise qu'ils n'ont plus le temps d'être des témoins pour leur entourage.

► Les Eglises doivent apprendre à former des disciples du Christ.

Des avantages de la post-modernité

La post-modernité offre de nouvelles occasions de témoignage et de développement aux Eglises. Leur responsabilité est de saisir ces occasions.

► Dans les Eglises de la post-chrétienté, on ne trouve presque plus que des gens qui ont choisi d'y venir. Plus personne ne vient au culte par pression. Les communautés sont donc plus petites, mais elles savent où elles en sont. Elles ont l'occasion d'être à nouveau des Eglises. Quelle était la proportion de véritables chrétiens dans les Eglises de l'ancienne chrétienté ? Nous ne le savons pas exactement !

► Les Eglises de la post-chrétienté ont l'occasion de raconter l'histoire de Jésus de manière nouvelle à des personnes qui ne connaissent rien de lui. Beaucoup vont être passionnés en découvrant cette histoire. Lors d'une visite à une famille, un prêtre anglican a raconté l'histoire du fils prodigue. Les auditeurs, très touchés par l'histoire, ont demandé si le prêtre l'avait inventée. Ensuite, en apprenant que l'histoire avait été racontée par un certain Jésus, ils ont demandé si ce Jésus était l'auteur d'autres histoires.

► Les Eglises ont la chance de se libérer de leur compromission avec le pouvoir politique. La post-chrétienté leur donne l'occasion de retrouver leur goût, le fait d'être sel dans la société.

► Les Eglises ont l'occasion de lire la Bible de manière nouvelle. Celle-ci a souvent été interprétée de manière ennuyeuse, de manière à ne pas déranger la société. Ses interpellations ont été spiritualisées afin de ne pas mettre en question et déranger. Mais la vie et l'enseignement de Jésus font sens pour beaucoup de gens. Je collectionne les histoires d'athées fascinés par la vie et l'enseignement de Jésus. Ils ont parfois une meilleure compréhension de Jésus que les chrétiens.

La post-chrétienté n'est pas une situation finale, mais une transition qui n'est pas encore terminée.

Propos résumé par Claude-Alain Baehler

  • Encadré 1:

    Evangélisation, implantation d'Eglises et discipulat dans la post-chrétienté

    Lors d'une seconde intervention, Stuart Murray a développé trois domaines dans lesquels nos Eglises doivent évoluer si elles veulent avoir un impact dans la société : l'évangélisation, l'implantation de nouvelles Eglises et la formation de disciples.

    L'évangélisation, l'implantation d'Eglises et la formation de disciples sont trois domaines dans lesquels nos Eglises ont à réfléchir dans une société post-chrétienne.

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    1. L'évangélisation dans la post-chrétienté

    Plusieurs défis nous attendent dans notre manière de pratiquer l'évangélisation. En voici quatre :

    ► Un défi nous attend dans notre manière d'évangéliser, parce que les gens ne savent presque plus rien du christianisme. Mais nos programmes d'évangélisation ne tiennent pas encore compte de cela.

    Ainsi, les cours Alpha ont constitué un progrès important par rapport aux anciennes méthodes d'évangélisation. Mais ils s'adressent encore à des gens dont on suppose qu'ils connaissent beaucoup de choses concernant la foi chrétienne. Les cours Alpha emploient un langage chrétien que les gens ne comprennent plus.

    ► Un autre défi vient du scepticisme et de la critique causés par le passé peu reluisant des Eglises. Les gens savent que des choses horribles ont été commises au nom du Christ.

    Par exemple, à la fin d'un cours Alpha, des participants ont remercié. Puis ils ont posé des questions personnelles en plus des questions « officielles », prévues dans le cours. Première question : « Pourquoi un Dieu d'amour permet-il la souffrance ? » Seconde question : « Si vous affirmez que l'Evangile est vrai, alors pourquoi les chrétiens se sont si mal comportés par le passé ? » Cette question était suivie d'une liste impressionnante de crimes commis par des chrétiens. Nous allons devoir répondre aux questions que les gens se posent vraiment et prendre au sérieux leurs critiques.

    ► Un troisième défi est lié à la confiance que nous avons en nous-mêmes. Nous voyons nos Eglises diminuer et cela nous pose des questions. Avons-nous encore vraiment confiance en l'Evangile ? Croyons-nous toujours que celui-ci est la puissance de Dieu pour le salut. Il existe une sorte de flottement dans ce domaine.

    ► Le quatrième défi tient au fait que les chrétiens ne vont plus pouvoir « jouer à domicile ». Par le passé, évangéliser signifiait inviter des gens à venir dans nos bâtiments, afin d'écouter nos programmes. Dans la chrétienté, c’est normal et plutôt efficace. Mais aujourd'hui, les bâtiments d'églises font peur à beaucoup de gens. Ils ne voient pas ce qui se passe à l'intérieur à moins d'y entrer. Ils se gardent donc bien d'y entrer.

    Pendant des siècles, l'évangélisation a consisté à inviter et à faire entrer. Désormais, ce sont les chrétiens qui vont devoir sortir à la rencontre des gens. Les chrétiens vont devoir aller là où les autres gens sont à l'aise, mais aussi où eux-mêmes peuvent ne pas se sentir à l'aise du tout.

    Lors d'un match de football, il est très différent pour une équipe de jouer « à domicile » où « à l'extérieur ». L'équipe en visite doit s'habituer à un stade inconnu, peut-être intimidant. Les chrétiens ont joué à domicile durant des siècles. Désormais, il doivent jouer à l'extérieur. L'Evangile nous demande d'aller à la rencontre ; cela demande une approche différente de celle à laquelle nous sommes habitués.

    La culpabilité a disparu

    Souvent, lorsque nous évangélisons, nous partons du principe que les gens se sentent coupables et nous leur parlons de pardon et de repentance. Mais, s'ils ne se sentent pas coupables, quelle Bonne Nouvelle du salut pouvons-nous annoncer ? Comment dire l'Evangile à une personne heureuse, honnête et sans problèmes avec Dieu ?

    La culpabilité n'est plus un sentiment répandu. Et beaucoup de chrétiens le sont devenus sans avoir éprouvé de sentiment de culpabilité. Nous pourrions, dans une approche luthérienne, montrer aux gens qu'ils sont coupables en leur annonçant premièrement la Loi. Peut-être se sentiraient-ils enfin coupables ! Mais, une autre approche plus efficace consiste à parler de sujets qui posent véritablement problèmes, tels que la honte, la crainte ou la solitude.

    Nous avons cru qu'il n'existe pas de personnes dépourvues de sentiment de culpabilité. Nous avons cru que ces personnes portaient un masque. Nous devons comprendre qu'il existe de nombreuses personnes véritablement dépourvues de sentiment de culpabilité.

    Nous allons aussi devoir repenser notre manière de parler de culpabilité lorsque nous rencontrons certaines catégories de personnes. Comment parler de la Bonne Nouvelle du salut à des personnes abusées, démolies par les péchés des autres ?

    Poser des questions plutôt que donner des réponses

    Un autre changement majeur touche notre manière de parler des questions de foi avec des non-chrétiens. Traditionnellement, les évangéliques aiment répondre aux questions qu'ils imaginent chez les non-chrétiens. Pourtant, dans son ministère, Jésus n'a répondu qu'à peu de question. Il a plutôt répondu en racontant des histoires ou en posant à son tour des questions. Il voulait ainsi aider les gens à découvrir par eux-mêmes plutôt qu'à recevoir des réponses toutes faites.

    Dans notre société post-chrétienne, les gens se méfient des réponses. Redécouvrons donc les méthodes de Jésus et soyons connus pour nos questions plutôt que pour nos réponses.

    Se faire des amis non-chrétiens

    L'amitié est un puissant ressort de l'évangélisation. La plupart des gens deviennent chrétiens, parce qu'une personne de confiance les a introduits à Jésus. En effet, nous partageons qui nous sommes avec nos amis.

    Construisons donc des amitiés en dehors de l'Eglise. Mais attention, il doit s'agir de véritables amitiés, pas d'outils d'évangélisation. Le concept d'évangélisation par l'amitié me donne la nausée, car il est en fait une manipulation. Et souvenons-nous que, dans notre culture, la plupart des gens ne deviennent pas chrétiens en un instant, mais au cours d'un processus qui peut prendre des semaines, des mois, voire des années.

    Vivre notre foi

    Nous vivons dans une culture suspicieuse. Les gens veulent voir et pas seulement entendre. Il est donc très important que les chrétiens accordent leurs paroles à leurs actes et qu'ils vivent pleinement leur foi.

    Par le passé, dans les Eglises évangéliques, il était demandé à une personne intéressée par Jésus de croire, puis de se comporter comme un évangélique, puis enfin d'appartenir à une communauté. Actuellement, dans bien des Eglises, cet ordre change. Les gens intéressés par Jésus veulent d'abord appartenir à une communauté, voir comment les chrétiens vivent leur foi et ensuite décider s'ils veulent croire.

    La conséquence est qu'il n'est plus possible de savoir précisément qui fait partie d'une Eglise locale. Il devient donc nécessaire, pour chaque communauté, de posséder un noyau de chrétiens solides, ce qui permet de ne pas avoir à définir trop précisément les frontières de l'Eglise.

    Nous pouvons comparer cette évolution à un pré à moutons. Chez un paysan anglais, la prairie où se trouvent les moutons est soigneusement clôturée. Mais, chez un paysan australien, la prairie est si grande qu'il est impossible de la clôturer. C'est pourquoi le paysan australien, au lieu de clôturer son pré à moutons, creuse des puits où les animaux viendront régulièrement s'abreuver.

    2. L'implantation d'Eglises dans la post-chrétienté

    L'implantation de nouvelles Eglises joue un rôle crucial dans la manière des chrétiens d'atteindre la culture post-chrétienne. Pourtant, certains, voyant de nombreuses Eglises décliner, pensent que nous devrions renforcer ce qui existe encore, plutôt que d'implanter de nouvelles Eglises. Demandons-nous donc à quoi sert l'implantation de nouvelles Eglises.

    ► D'abord, dans certaines régions d'Europe, il est devenu nécessaire d'implanter de nouvelles Eglises pour remplacer celles qui ont fermé. La disparition d'Eglises locales est un mouvement qui va s'accélérer en Europe. Si nous voulons que la présence de Jésus soit manifestée un peu partout, la création de nouvelles Eglises s'impose.

    ► Ensuite, nous avons besoin de nouveaux types d'Eglises. Nous n'avons pas besoin de nouvelles Eglises qui ressemblent à celles que nous avons déjà, mais de communautés capables d'expérimenter de nouvelles formes, de rejoindre une nouvelle culture et d'atteindre les gens qui en font partie. De nombreuses Eglises actuelles n'auront pas la capacité de s'adapter à la nouvelle culture.

    ► L'implantation d'Eglises permet également de mettre au travail des chrétiens évangélistes et implanteurs qui dérangeraient dans des Eglises déjà existantes. Le travail de ces pionniers permet aux autres Eglises de voir ce qui se fait et de s'en inspirer.

    L'implantation d'Eglises permet donc le renouvellement indispensable de l'institution. Cela implique que des pionniers soient formés, équipés et soutenus. Ils doivent être encouragés à implanter de manière créative, imaginative, en prenant des risques. Serez-vous déçus si leurs Eglises sont différentes de la vôtre ? Aurez-vous la patience de soutenir l'implantation d'une nouvelle Eglise ? Car cela prend plus de temps aujourd'hui que par le passé. Ce qui se faisait en trois ans se fait aujourd'hui en dix.

    3. La formation de disciples dans la post-chrétienté

    Nous ne vivons pas dans une zone neutre en matière de formation de disciples. En effet, notre culture est très efficace pour faire des disciples grâce aux médias. Et elle encourage les gens à adopter certaines valeurs contraires à l'Evangile. Ainsi, les Eglises ne sont pas seules à former des disciples : elles ont de la concurrence !

    Dans les Eglises, il ne suffit pas de savoir entonner des chants de louange et écouter des prédications. Nous devons former des disciples. En cela, nous rejoignons les pratiques de l’Eglise des premiers siècles. Celle-ci dispensait un catéchisme permettant à chaque croyant de savoir comment suivre le Christ. Elle faisait appel à des coachs. Elle procédait à une sorte d'exorcisme culturel, un décryptage permettant de savoir ce qui, dans la culture ambiante, était bon et ce qui devait être mis de côté. Un retour à ces pratiques est nécessaire dans nos Eglises.

    Comment développer la formation de disciples ? L'Eglise locale doit devenir un lieu de discernement et de résistance. Elle doit aider les chrétiens à résister à la culture ambiante. Elle doit permettre une continuité entre le culte dominical et la foi vécue au quotidien.

    Par exemple, dans une communauté, il pourrait être intéressant d'identifier les idoles à la mode et de s'en moquer. Nous pourrions projeter et déconstruire des publicités qui passent à la télévision. Nous pourrions voir comment ces publicités nous modèlent à notre insu et comment elles font de nous des disciples non-chrétiens.

    La culture ambiante prône l'individualisme ; nous pouvons enseigner la redevabilité dans nos Eglises. En effet, l'Evangile commande de prendre soin les uns des autres. Le discipulat est un moyen, non de dire aux autres ce qu'ils doivent faire, mais de nous entraider dans la foi. Par exemple, nous pouvons nous entraider à bien utiliser notre argent, à ne pas céder au consumérisme. Pourquoi ne pas montrer nos dépenses à des amis chrétiens en qui nous avons confiance et les laisser faire leurs remarques ?

  • Encadré 2:

    Refuser la nostalgie, comme au temps de l'exil

    Au bord des fleuves de Babylone, nous nous étions assis et nous pleurions en pensant à Sion. Aux saules de leurs rives, nous avions suspendu nos harpes.

    Ceux qui nous avaient déportés, nous demandaient des chants. Nos oppresseurs voulaient des airs joyeux : « Chantez-nous, disaient-ils, quelque chant de Sion ! » Comment peut-on chanter les chants de l'Eternel sur un sol étranger ?

    Si jamais je t'oublie, Jérusalem, que ma main droite perde sa force ! Oui, que ma langue se colle à mon palais si je ne pense plus à toi, Jérusalem, si je ne te mets plus avant toute autre joie.

    Souviens-toi, Eternel, des Edomites qui en ce jour du malheur de Jérusalem, criaient bien fort : « Rasez-la donc, rasez-la jusqu'aux fondations ! »

    O Babylone, tu seras dévastée ! Heureux qui te rendra ce que tu nous as fait ! Heureux qui saisira tes nourrissons pour les briser contre le roc ! (Psaumes 137)

    Certains suggèrent que la post-chrétienté est comparable à l'exil des Israélites à Babylone. L'amertume, le regret et le désir de vengeance peuvent nous submerger. Pourtant, dans un monde rempli de réfugiés, nous avons besoin d'apprendre en quoi consiste l'exil.

    Le prophète Jérémie a annoncé l'exil à ses compatriotes. Une fois celui-ci arrivé, il a exercé un ministère pastoral envers les exilés. Il leur a dit de pas écouter les faux prophètes, ceux qui recommandaient de ne pas s'inquiéter parce que tout reviendrait bientôt comme avant. Au contraire, il leur a recommandé de s'installer, de construire des maisons, d'apprendre à vivre sur leur nouvelle terre et de chercher le bien du pays dans lequel Dieu les avait envoyés. C'est ce qu'ont fait, par exemple, Daniel et ses amis.

    Comme les Israélites en exil à Babylone, nous devrons envisager l'avenir de l’Eglise dans une réalité nouvelle et différente. Ce nouvel environnement ne doit pas être considéré comme ennemi. Les chrétiens ne doivent pas se retirer dans un ghetto. Au contraire, ils doivent aimer des gens différents d’eux-mêmes et chercher le bien de leur société post-chrétienne. Ils doivent refuser la nostalgie, être réalistes et apprendre à vivre dans un pays étranger.

  • Encadré 3:

    Stuart Murray

    Stuart Murray habite à Bristol, en Angleterre. Il travaille pour le Réseau anabaptiste comme formateur et consultant. Il est l’auteur de plusieurs livres sur la mission en milieu urbain et la post-chrétienté, dont « Radicalement chrétien ». Homme de terrain, il a fondé l’organisation Urban Expression, qui développe des Eglises pionnières en milieu urbain au Royaume Uni et aux Pays-Bas.

Serge Carrel

Serge Carrel est au bénéfice d’une formation double: théologique et journalistique. Après dix ans de pastorat en France et en Suisse romande, il a travaillé huit ans comme journaliste aux émissions religieuses de la RTS. Aujourd’hui formateur d’adultes et journaliste en lien avec la Fédération romande d’Eglises évangéliques (FREE), il essaie de tirer le meilleur parti de ce double ancrage. Que ce soit dans le cadre du FREE COLLEGE, de lafree.ch, de Vivre ou de la fenêtre chrétienne de MaxTV.

Formation reçue

Master en théologie (UNIL, 1986)
Centre romand de formation des journalistes (RP, 1996)

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