A la tête d’une paroisse de quelque 700 membres à Boma, dans la province du Bas-Congo, Jacques Bakulu di Mapianda connaît bien les besoins et les difficultés de sa population. Lors d’un culte œcuménique diffusé à la Télévision suisse romande à la paroisse d’Ursy (FR), il a indiqué que le peuple congolais vivait dans une misère sans précédent. « A tel point qu’il préfère la période coloniale. Parce que je peux vous assurer aujourd’hui que le Congolais naît pauvre, grandit pauvre, vit pauvre, meurt pauvre...pour être enterré dans un sous-sol riche. »
Ce commentaire laconique, qu’il a confirmé en aparté dans les locaux de l’ONG Action de Carême à Lausanne, révèle à lui seul tout le paradoxe de son pays : la République démocratique du Congo compte parmi les plus riches en matières premières, et connaît un indice de pauvreté parmi les plus élevés de la planète.
Pillage dénoncé L’enquête* menée sur le terrain par les ONG Pain pour le prochain et Action de Carême dénonce le pillage des matières premières de ces pays du Sud par des conglomérats occidentaux. Dans un rapport étoffé, elle rend compte du travail de ces mineurs qui « creusent des trous et des tunnels, presque à mains nues et sans aucun équipement de sécurité. » Pour descendre dans les mines, dont la profondeur peut aller jusqu’à 40 mètres, les mineurs n’ont pas d’échelle... et gagnent des salaires risibles, 3 à 5 dollars par jour en moyenne.
Au bénéfice de titres universitaires en théologie, psychologie, et développement, Jacques Bakulu di Mapianda, 51 ans, marié et père de cinq enfants, est né dans une famille paysanne. Coordinateur du CEPECO, le Centre pour la promotion et l’éducation des communautés de base, il est pasteur depuis 1993 et se décrit comme un ancien serviteur de Dieu. Et c’est en tant que tel qu’il incite le gouvernement de Kinshasa à adopter des lois qui tiennent compte des intérêts des communautés locales.
Deuxième Evangile« J’ai commencé à lutter pour les droits de ces communautés à l’âge de 30 ans et c’est ma foi qui me motive, déclare-t-il. Le travail de développement que je fais, c’est mon deuxième Evangile. J’inscris mon combat à la suite du Christ qui a prêché la foi, le salut des hommes, et qui a aussi nourri et guéri les gens. » Cette œuvre sociale qu’il estime indissociable de la foi chrétienne, il la pratique dans sa province congolaise au quotidien, en créant des associations paysannes qui garantissent à leurs membres une « alimentation de survie. »
Les affiches de la campagne de Carême placardées dans les rues de nos villes présentent une assiette avec des minerais comme du coltan, de l’or et du cuivre. Autant de matières premières utilisées dans nos téléphones portables, nos bijoux ou nos fils électriques... qui ne nourrit pas ceux qui les extraient ! Avec le titre « un business indigeste », les principales grandes œuvres d’entraide suisses épinglent sans détour le scandale de ce commerce et ses conséquences sur les populations locales, pour qu’un jour, elles puissent exploiter leur sol pour elles-mêmes. Jacques Bakulu di Mapianda incite d’ailleurs son gouvernement à créer sur place des entreprises de transformation des matières premières, « ce qui offrirait des possibilités de travail sur place et permettrait le développement de l’économie locale. »
Gabrielle DesarzensUn prêche pour l’équité : Jacques di Mapianda Bakulu intervient mercredi 30 mars à 10h30 dans l’émission A vue d’esprit de la Radio suisse romande.
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* www.droitalimentation.ch