Reto et Barbara Lampert repartent pour le Tchad. Leur but : développer un centre de formation

mercredi 08 juillet 2009
Reto et Barbara Lampert, de l'Eglise évangélique La Fraternelle à Nyon et piliers de la Commission Afrique de la FREE, s'envolent le 25 juillet pour le Tchad. Ils coordonneront un projet de centre polyvalent de formation. Vingt ans après un premier séjour au Tchad, qu'est-ce qui les motive à repartir? Interview.

«Il y a vingt ans, on s'était toujours dit qu'on pourrait repartir une fois, raconte Barbara Lampert. Mais le jour où cette possibilité s'est concrétisée, c'était nettement moins simple que ce que je l'imaginais! Je n'avais plus du tout envie de bouger. De tout laisser, c'est pas si facile. On a des attaches, tout un réseau social, et des engagements importants.» Cet été, Reto, 54 ans, et Barbara, 52, laisseront leurs quatre enfants adultes, ainsi que leur petite-fille, pour partir à Bitkine, une petite ville au centre du Tchad.

Pourquoi attendre?
Reto est maître de travaux manuels et Barbara enseignante. Depuis longtemps, ils réfléchissaient à s'engager dans une oeuvre sociale, ou à partir à l'étranger. Sans savoir où ils iraient, Reto s'est préparé en suivant des cours de management, et Barbara des cours de théologie. «Si tu dis : «J'attends la retraite», s'exclame Reto, qui dit que tu seras en bonne santé pour partir? On a encore des forces, et ça fait des années qu'on en parle: pourquoi attendre?»
Reto et Barbara Lampert ont d'abord exploré un projet au Rwanda, mais la porte s'est fermée l'automne dernier. Juste après, Christian Simonin, le secrétaire de la Mission évangélique au Tchad (MET), entend parler de leur candidature... alors qu'il cherche depuis longtemps un couple de formateurs pour Bitkine! Le contact établi, les choses s'enchaînent... «On a eu un moment d'hésitation, admet Reto, car on avait déjà travaillé à 60 km de là. Mais le déclic s'est fait quand on a appris que les stagiaires que nous avions formés à l'époque avaient tenu le coup dans leur métier.» Les Lampert ont une expérience de vie qui s'intègre bien à l'ensemble du projet. «Et ce qui nous plaît, ajoute Barbara, c'est que ce projet a un début et une fin, avec des objectifs. L'idée est qu'en quatre ans, une structure puisse fonctionner et qu'on puisse se retirer.»

Une formation pour la vie
Il y a vingt ans, Reto et Barbara avaient travaillé dans un centre de formation artisanale. L’ONG s’étant retirée, les personnes formées sont reconnues aujourd'hui encore, pour être de bons artisans! Pourquoi donc envoyer à nouveau des volontaires en développement, si le personnel local est formé? «On va coordonner un centre polyvalent de formation, explique Reto, et créer un réseau de formateurs locaux ou qui ne viennent pas forcément de la même région.» L'idée est de faire venir des artisans spécialisés, pour des sessions de formation sur quelques mois.
Les Lampert coordonneront le projet et ne donneront pas forcément de cours. «On part à zéro. C'est assez génial! s'enthousiasme Reto. On élaborera les projets de formation, en fonction des formateurs et des débouchés professionnels.» Dans cette petite ville du Tchad, il ne s'agit pas de créer une haute école d'ingénieurs, mais de donner aux jeunes des formations de base qui leur permettent de vivre.
L'Eglise a déjà acheté un terrain de 8000 m2environ, à la sortie de Bitkine. Elle souhaite donner des débouchés à des jeunes que la fédération d’Eglises accueille déjà dans quatre internats destinés aux lycéens venant des villages. Ces jeunes ont la possibilité de participer à une méditation biblique le matin... un moyen de présenter l'espérance chrétienne dans un contexte musulman! Après leurs études, seulement 10% de lycéens ont un débouché universitaire ou partent à la capitale comme fonctionnaires. Les autres n'ont pratiquement aucun avenir professionnel, d'où l'idée de leur proposer une formation technique au centre de Bitkine.

Favoriser l'économie locale des pays du Sud...
Une analyse des besoins a démontré par exemple que la région manque de plombiers. Il s'agira aussi d'innover... et le maître de travaux manuels fourmille d'idées! «J'ai pris contact avec une entreprise en France qui fabrique des lampes LED, raconte Reto. Il y aurait peut-être un filon à développer dans l'assemblage de ces lampes qui économisent l'électricité. On pourrait aussi imaginer un réseau de petits commerces pour recharger ces lampes... On envisage également de réaliser des cuisinières solaires, surtout qu'il y a des limitations de coupes de bois. Le président a décrété qu'il ne fallait plus utiliser le charbon, pour protéger la nature, mais il n'a rien proposé en contrepartie!»
Des modèles de four solaire ont déjà été testés en France. Il s'agit d'une boîte, fermée par une vitre au-dessus. Et autour, en guise de réflecteur... du papier d'aluminium! La température peut monter jusqu'à 150 degrés. Le problème, c'est que les Tchadiens cuisent la boule de mil et qu'il faut brasser régulièrement. Sur sa terrasse de St-Cergue, Reto a donc bricolé des prototypes de réflecteurs solaires, où l'on peut continuer à brasser durant la cuisson!

...un défi pour les envoyés du Nord !
Favoriser l'économie locale, c'est permettre aux jeunes d'avoir un moyen de subsistance, tout en restant en province. «Un type de projet comme ça tombe à pic, commente Reto, avec toutes les réflexions qu'on a en Suisse autour des requérants d'asile. On dit qu'ils n'ont qu'à rester chez eux... Mais qu'est-ce qu'on fait pour qu'ils y restent? Investir en essayant de créer une économie locale, c'est du spirituel par ricochet!»
L'Eglise tchadienne est très pauvre. Pourtant, elle aimerait aider les filles-mères qui ne peuvent plus aller à l'école et terminer leurs études. Dans le centre polyvalent, l'Eglise leur offrira un avenir, au travers de cours d'alphabétisation et d'une petite formation.
Dans le centre, ce sont aussi des collaborateurs locaux que l'Eglise veut former. Plusieurs couples ont le projet de s'installer dans des villages musulmans pour y être témoins du Christ. S'ils arrivent avec un métier, leur intégration sera facilitée. Leur témoignage aura plus d'impact et ils seront autonomes sur le plan financier!
«J'ai aussi très à coeur les femmes de ces collaborateurs tchadiens, raconte Barbara, car elles ne sont pas très considérées. Je tâcherai de leur montrer leur importance pour Dieu, leur famille et la société.» Comme la plupart de ces femmes ne sont pas scolarisées, elles ne parlent pas français. Dès leur arrivée, les Lampert suivront donc un mois de cours intensifs d'arabe. Ce sera leur premier défi!

Un lieu de passage
Le terrain acheté par l'Eglise est un lieu de passage des nomades. Il faudra d'abord dresser une clôture tout autour pour le préserver. Le plan de construction est très ambitieux: outre les salles de cours, le centre aura une bibliothèque, une salle informatique et un atelier de menuiserie. L'Eglise souhaite à terme y ajouter une salle de conférences, pour des animations spirituelles.
A l'heure où les missions favorisent les collaborateurs du sud vers le sud, pourquoi partir? «Les envoyés nord-sud jouent un rôle important par un appui aux organisations partenaires démunies, explique Reto. Car beaucoup disent: «On ne connaît pas de bons collaborateurs sud-sud, donc on ne les finance pas!» Je suis convaincu qu'il faut garder des contacts, cela fait partie des relations inter-églises dans le monde. Le partenariat dans les relations fraternelles, c'est la base!»

Anne-Catherine Piguet

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