Un groupe qui ne se renouvelle pas meurt. Et nos Eglises ne font pas exception. C'est pourquoi se pose régulièrement la question: « Y a-t-il des jeunes pour rependre le flambeau ? » Nous avons demandé à plusieurs animateurs jeunesse à l'œuvre dans des Eglises de la FREE de nous parler des jeunes de 15 à 25 ans.
Ce qui frappe de prime abord, c'est la diversité des situations: groupe de jeunes en veilleuse dans certaines communautés, plusieurs groupes dans d'autres et mini-réveils encore ailleurs. Cette diversité se retrouve dans le nombre de jeunes qui participent aux cultes dominicaux: souvent une fraction seulement de ceux qui se rendent au groupe de jeunes le vendredi ou le samedi soir, mais avec quelques exceptions notables et réjouissantes !
Alors, qu'est-ce qui fait venir les jeunes à l'Eglise? Voici quatre raisons de base mentionnées par les animateurs jeunesse.
Une volonté d'accueillir les jeunes
L'intégration des jeunes commence par une volonté ferme de la communauté de les accueillir. Plusieurs Eglises ont manifesté cette volonté en engageant des animateurs – ou animatrices – jeunesse. Parfois, les communautés ont uni leurs forces. Ainsi, Sébastien Demierre est animateur jeunesse dans les Eglises FREE de Vevey, Blonay, Clarens, Aigle et Château-d'Oex.
Les animateurs jeunesse ont avant tout un rôle de formation et de soutien. Ils aident les groupes à se doter de responsables consacrés et formés. Ils invitent les jeunes à participer à des événements qui vont les fortifier. Ils organisent des actions d'évangélisation, des camps, des événements sportifs. Ils ont souvent un rôle pastoral auprès des jeunes et ils sensibilisent la communauté aux besoins de la jeunesse.
Cependant, « l'engagement d'un animateur jeunesse n'est pas toujours la meilleure manière de régler la question de l'intégration des jeunes dans une Eglise, souligne Christophe Deshayes, pasteur jeunesse à Morges et à Lausanne. Il ne faudrait pas que cela soit, pour une communauté, le moyen de se décharger de l'accompagnement des jeunes sur un spécialiste. »
Des activités rien que pour les jeunes... et intergénérationnelles
L'intégration des jeunes passe aussi par un double mouvement. Ceux-ci ont à la fois besoin d'être entre eux... et de se confronter aux autres générations. Ainsi, ils ont besoin d'un groupe de jeunes, d'un local à « investir », d'activités qui leur sont réservées.
Mais il leur faut aussi découvrir les autres générations et les autres secteurs de la vie d'Eglise. A Echallens, cela passe par un « camp famille » communautaire ou par le prêt du local du groupe de jeunes aux enfants de l'école du dimanche. A Bienne, Matthieu Schmid travaille à la mise en place de « stages » pour les adolescents. Il explique: « Ceux-ci auront l'occasion de découvrir des secteurs spécifiques de l'Eglise: la sonorisation, l'utilisation du beamer, la louange, l'accueil, l'organisation de cultes... »
Mais pour Sébastien Demierre « l'intégration dans l'Eglise doit commencer avant la jeunesse, dès l'enfance. Elle doit être thématisée dès l'école du dimanche. Quant aux jeunes, ils ne refusent absolument pas de rencontrer les autres générations de l'Eglise. Mais il faut les aider dans ce domaine. »
Donner des responsabilités
L'intégration de jeunes dans l'Eglise passe par la possibilité, pour eux, de prendre des responsabilités. « Nous sommes attentifs à donner des responsabilités aux jeunes de la communauté, martèle Julien Russ, pasteur jeunesse à Echallens. Il faut le faire progressivement, en fonction de la maturité de chacun. »
Sébastien Demierre tient le même langage: « A Vevey, presque tous les participants au groupe de jeunes viennent régulièrement au culte, mais il faut aussi dire qu'ils sont presque tous actifs dans les différents secteurs de l'Eglise. »
Les indispensables relations
L'intégration des jeunes passe aussi par le relationnel. A l'heure du virtuel omniprésent, des communications par MSN, SMS, MMS, Facebook, Skype, Natel, courriel... les jeunes ont terriblement besoin de relations humaines. Les copains chrétiens et les membres du groupe de jeunes ont un effet d'entraînement et les aident à s'intégrer. Mais les liens avec des adultes qu'ils apprécient sont également précieux. Les jeunes doivent se sentir « en relation », appréciés, attendus, respectés.
Par exemple, à Nyon, les étudiants se retrouvent tous les jeudis à l'église pour un repas. « C'est une occasion de parler du culte, de la vie de l'Eglise, de leur joies et de leurs problèmes », se réjouit Alain Geiser, pasteur jeunesse dans cette communauté et dans celle de Lavigny. Ces repas permettent aux jeunes de nouer des amitiés, de s'intéresser à la vie d'Eglise et de s'y impliquer... en commençant par le culte dominical. A Echallens, Julien Russ cherche à établir des relations individuelles avec les jeunes: « Je les connais depuis longtemps, je les suis dans leur parcours de vie et leur démontre de l'intérêt. J'aimerais aussi sensibiliser les chrétiens de 25 à 35 ans, afin qu'ils soient des modèles pour les plus jeunes. Et, dans la foulée, j'aimerais que ceux qui ont plus de 35 ans comprennent la grande richesse que représentent les adolescents et les jeunes adultes de l'Eglise ». A Vevey, Sébastien Demierre fait du « coaching » pour des jeunes qui ont besoin d'être épaulés.
A Nyon, les rencontres du catéchisme ont lieu en même temps que les cultes. Cela permet aux animateurs d'inviter des membres de l'Eglise à venir donner leur témoignage auprès des jeunes. Alain Geiser précise: « Ceux-ci découvrent alors pourquoi leurs aînés participent à la vie de l'Eglise et viennent au culte. »
Pour Sébastien Demierre, « les jeunes ont besoin de modèles qui les inspirent et leur donnent envie de se confier en Dieu. Et, quoi qu'on dise, ce qui fait finalement la différence dans ce phénomène ‘d'entraînement par l'exemple’, c'est le nombre de jeunes qui ont eux-mêmes fait une expérience avec Dieu ».
Accueil, collaboration entre générations, responsabilités, relations... Les responsables jeunesse de nos Eglises, loin d'appliquer des recettes toutes faites qui n'existent pas, s'adaptent avec discernement et pragmatisme à des situations très variées. Ils démontrent d'abord que la présence des jeunes au culte n'est pas une fin en soi, mais la conséquence de leur intégration réussie dans la vie de l'Eglise. Ils démontrent ensuite que, plus que de technologie et d'organisation, les jeunes de nos communautés ont besoin d'être rencontrés. Et c'est cela qui les aide à rencontrer Dieu.
Claude-Alain Baehler