« Patience, patience ! » C’est la formule qu’a utilisée le député Philippe Jobin à l’endroit des EMS de conviction chrétienne à l’issue de la journée de débat au Grand Conseil vaudois autour de l’initiative Exit. « Mettons en application le contre-projet voté par le parlement et nous verrons les difficultés d’application. Il sera temps, alors, de proposer une motion pour modifier le contre-projet et satisfaire tout le monde ! »
Un débat de 4 heures
L’obligation pour les établissements sanitaires vaudois de laisser entrer Exit ou toute autre association d’assistance au suicide dans les EMS subventionnés était à l’ordre du jour des débats du Grand Conseil le mardi 15 février au Palais de Rumine à Lausanne. Le débat a duré 4 heures. Il a été digne et très respectueux des différents avis. Avec d’un côté une petite minorité emmenée par la députée Véronique Hurni qui a défendu l’initiative Exit, de l’autre quelques députés autour de Maximilien Bernhard qui plaidaient le refus tant de l’initiative que du contre-projet, et au milieu la grande majorité du parlement qui s’est montrée satisfaite du contre-projet défendu par le Conseiller d’Etat, Pierre-Yves Maillard.
Un contre-projet qui met des « cautèles »
« Le contre-projet pose un cadre. Il met des conditions et des ‘cautèles’ précises », commente Philippe Jobin. Face à une initiative « draconienne », ce contre-projet pose des conditions à l’acceptation d’Exit dans les EMS : la demande réitérée du patient, sa pleine capacité de jugement, le caractère incurable de sa maladie. « De plus, il protège les soignants en leur interdisant en tant que professionnels d’assister à l’absorption de la potion létale. »
De son côté, le rapporteur du groupe socialiste, le député Claude Schwab a salué le fait qu’« une majorité assez claire s’est dégagée pour trouver des solutions aussi humaines que possible à un débat très difficile ».
« Je fais confiance au Conseil d’Etat ! »
Au cours du débat, Jean-Luc Chollet, député UDC et membre de l’Eglises évangélique de Villard à Lausanne, a exprimé son soutien au contre-projet en rappelant que ses convictions spirituelles ne devaient pas être érigées en lois pour des personnes ne partageant pas ses convictions. Il a toutefois relevé qu’il « ne pouvait accepter que des EMS à caractère religieux soient contraints de pratiquer le suicide assisté. Je fais confiance au Conseil d’Etat, a-t-il ajouté, pour, en son temps, trouver et faire accepter une solution à ce problème. »
Le député Claude Schwab n’est pas loin de partager cet avis. « C’est vrai, commente-t-il, qu’il y a le risque, sur le papier, que ces EMS se voient couper les vivres. Dans la réalité, nous sommes encore en Pays de Vaud et nous trouverons des aménagements ! » Pour ce pasteur réformé à la retraite, la mise en avant de l’éthique de l’établissement auprès de tout nouveau pensionnaire devrait permettre à celui-ci d’échapper à toute demande d’assistance au suicide, et donc à toute difficulté avec l’Etat.
Un vote tactique plus que de conviction
« Je me rends compte que dans ce parlement, certains frères et sœurs en Christ, catholiques, réformés ou évangéliques, on voté ‘tactique’, explique l’évangélique Maximilien Bernhard. Moi, j’avais décidé de voter par conviction non à l’initiative et non au contre-projet. » Au vu de la tournure des événements, le député UDF envisage avec son parti d’inviter au double non lors de la votation de juin prochain : « Un non franc à l’initiative et modéré par rapport au contre-projet, la moins mauvaise des solutions du point de vue éthique. »
Serge Carrel