Grâce aux micro-crédits du CEMADEF, 7000 Congolais sortent de l’extrême pauvreté

mercredi 15 décembre 2010

L’Eglise évangélique de Meyrin a le coeur qui bat pour la région de Bunia en République démocratique du Congo. Une de ses membres, Fanny Ukety, y développe depuis la Suisse un projet de micro-crédit. Echos de deux membres de cette Eglise qui ont pris le temps de visiter le projet sur place.

Daniel Strubin et Francine Parnigoni reviennent assez bouleversés de leur expérience congolaise d’octobre dernier. Ces deux membres de l’Eglise évangélique de Meyrin ont été touchés par la rencontre de centaines de femmes qui, grâce au programme du CEMADEF lancé par Fanny Ukety, membre de leur Eglise, sortent de l’extrême pauvreté. « C’est la première fois, avoue Daniel, que je comprends vraiment ce texte de Matthieu 25 où Jésus dit : J’étais affamé et vous m’avez nourri, nu et vous m’avez vêtu... ».

Un projet fou
Dans cette région de la RDC ravagée par une guerre ethnique attisée par les convoitises extérieures liées aux matières premières, la théologienne congolaise Fanny Ukety a lancé il y a quelques années un programme de micro-crédits pour relancer des activités génératrices de revenus pour les femmes.
Lors de sa visite initiale dans cette région, Fanny découvre une misère indescriptible. A la suite de la rencontre de ces femmes qui ont tout perdu, elle se lance dans un projet fou, presque sans moyens à l’époque : relancer l’économie avec des micro-crédits, de l’ordre de 20 à 100 $. Cela n’a pas été tout seul, et des obstacles importants rencontrés durant les trois premières années auraient pu tout faire capoter. Sans se décourager, Fanny a tenu le coup, réorganisé, réorienté, mis en place les structures nécessaires. Aujourd’hui, le programme touche 1250 femmes et 500 autres sont en attente...
 
Découverte avec le cœur et la raison
Daniel, informaticien de profession, jeune retraité de son emploi dans une banque privée, est parti sans idée préconçue, le cœur ouvert, pour « capter » tout ce qu’il pouvait de cette situation et de cette expérience dont l’Eglise évangélique de Meyrin n’entendait parler que par la voix de Fanny. Nos amis touchent de près ce que signifie l’extrême pauvreté en visitant ces femmes chez elles. « Ce ne sont même pas des maisons, tout juste des cabanons, souvent sans même un toit, et on dort à même le sol. Mais leur reconnaissance nous a touchés aux larmes. Notamment le jour où on nous a donné une poule – soit le repas d’une famille typique, avec 10-12 enfants et parfois un mari... Cette expérience me travaille toujours. »
Au-delà de l’émotion de la découverte et de la rencontre, Daniel passe des heures à lire (souvent à la lampe de poche !) et à se documenter. Il dévore plus de 600 pages, pour comprendre le micro-crédit et analyser le fonctionnement de ce projet. Il s’est aussi armé d’un canevas d’évaluation... qu’il lui faudra adapter. « Le CEMADEF est extrêmement bien organisé, explique-t-il, avec des cahiers des charges précis, des exigences éthiques élevées, un suivi serré. Il assure une formation continue des bénéficiaires et des cadres. Il a une excellente réputation auprès des autorités. Aujourd’hui, c’est une population d’environ 7000 personnes, qui bénéficie du minimum vital : trois repas par jour, scolarisation des enfants, soins médicaux de base – dans une région où les services publics ne peuvent rien assurer de cet ordre. »
Dans cette région à majorité chrétienne, le CEMADEF, dirigé par une équipe de chrétiennes, est au service de tous sans distinction d’ethnie (un enjeu capital dans cet après-guerre) ou de religion. « Nous avons par exemple rencontré une participante musulmane, parfaitement à l’aise dans cette formation, se sentant libre de participer ou non aux célébrations. » D’ailleurs les organisations chrétiennes à Bunia ont une bonne réputation, comme l’université reconnue pour sa qualité et son éthique.
 
Un modèle reproductible
Pourquoi ce projet est-il le seul de son espèce qui ait « marché » dans cette région ? « Tout d’abord, souligne Daniel, il a été lancé et organisé par une personne du pays, qui d’une part connaît parfaitement le milieu, les personnes, les problèmes éthiques, la langue locale, et d’autre part connaît les exigences des donateurs occidentaux. Ensuite, cela fait 5 ans que Fanny Ukety met au point un programme en adaptant le micro-crédit aux conditions locales. Enfin, une équipe dirigeante solide et fiable – et multiculturelle – a été mise en place, permettant une véritable autonomie locale.
Un tel projet peut-il s’étendre ? Daniel en est convaincu. Et cela grâce aux sessions de formation, qui accueillent des participants d’autres régions voisines ; grâce aussi aux contacts que Fanny prend. « Nous avons eu la chance d’assister à une rencontre avec un chef de village qui nous avait invités dans une région voisine, et à qui Fanny a pu expliquer en détails le fonctionnement du système. » Ce sont donc des graines d’espérance qui sont ainsi plantées dans cette région dévastée. Daniel encourage tout un chacun à soutenir un tel projet – et même à aller voir sur place par lui-même !
Silvain Dupertuis
 
Le compte postal pour alimenter cette démarche de micro-crédit : ASSAFI-CEMADEF, 1217 Meyrin, 17-481862-6. Les dons suisses sont intégralement attribués au fonds des micro-crédits du programme.
  • Encadré 1:
    Une vidéo où Daniel Strubin parle de son expérience en RDC
    Henri Bacher de Logoscom.org a réalisé une vidéo où Daniel Strubin dresse un bilan de sa visite en RDC à la découverte des activités du CEMADEF. Un témoignage à voir.
  • Encadré 2:
    Le CEMADEF en bref
    Le CEMADEF, pour Centre multidiscipplinaire d’appui pour le développement de la femme, a été fondé en 2004 dans la région de Bunia, à l’est de la République démocratique du Congo. Par l’octroi de petits crédits, il permet à des femmes de prendre leur vie en main et de contribuer au mieux-être de leur famille. Actuellement, 1250 femmes bénéficient de crédits entre 50 et 100 dollars. 7000 personnes bénéficient directement de cette démarche de crédit. Le CEMADEF dispose d’environ 150’000 dollars à prêter.
    En Suisse, c’est l’association ASSAFI qui collecte en Suisse les fonds utilisés pour l’octroi de micro-crédits en RDC.
    Le CEMADEF s’est impliqué dans la publication de « Paroles aux jeunes », le dernier livre de StopPauvreté2015 avec la trajectoire de vie de « Birgitte. Le micro-crédit, un tremplin pour des études en pédiatrie ».
    Plus d’infos : www.cemadef.org.

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